« Hémimétabolie » est une série d’aquarelles sur papier. Sur la feuille blanche, sont dessinés au crayon
de bois le contour de deux, trois, quatre ou neuf carronds. Le carrond est une forme créer par la fusion
d’un demi-carré et d’un demi-rond. Chaque carrond est rempli, en partie ou en totalité, de pigments
bleues ou rouges, parfois des deux. Les formes se répètent mais leurs colorations varient du bleu ou
rouge, du plus clair au plus sombre.
L'artiste symbolise ici le vaste blanchissement de la Grande Barrière de corail d’Australie provoqué par
des températures océaniques supérieures à la moyenne entraînant l’expulsion des algues symbiotiques
qui donnent au corail sa couleur et ses nutriments. Les merveilleuses couleurs du corail, comme le rose
flamboyant, sont en train d’être remplacées par un blanc fantomatique. Les récifs peuvent s’en remettre
si l’eau refroidit, mais ils peuvent aussi mourir si le phénomène persiste. Elle souligne aussi comment
Heliopora coerulea ou corail bleu est aujourd'hui la seule espèce de son genre, alors qu’il y a quelques
100 millions d'années, celle-ci dominait dans la plupart des océans du monde. On ne découvre sa teinte
bleue qu'au moment de son décès, lorsque les petits polypes disparaissent, laissant apparaître le
squelette, sinon ne sont visibles sous l’eau que ces tentacules blancs quand il est vivant !
Le titre de la série vient de l'hémimétabolisme, qui définit une métamorphose singulière chez les
insectes. Le jeune individu subit plusieurs changements pour devenir un individu adulte, sans passer
par une étape d'inactivité et sans arrêter de se nourrir. Elle la relie avec la citation du Cheikh Hamidou
Kane "Quelquefois, la métamorphose ne s'achève pas, elle nous installe dans l'hybride et nous y laisse."
extraite de L'Aventure ambiguë.
Maud Louvrier Clerc évoque à travers cette série la spécificité d’un processus métamorphique
permanent et infini.